Jean-Frédéric Morin

by Oct 9, 2020

La diversité est une force. C’est plus qu’un slogan : c’est un fait empirique. L’hétérogénéité favorise l’innovation, qui est cruciale pour l’adaptation. C’est évident pour les biologistes, mais c’est également vrai en sciences sociales : (1) Les inventeurs avec des liens sociaux diversifiés obtiennent plus de brevets; (2) les employés qui dressent des ponts entre différents groupes sociaux au sein de leurs entreprises sont considérés comme plus innovants par leur employeur; (3) les étudiants qui ont une relation amoureuse avec quelqu’un d’un autre pays sont jugés plus créatifs par leurs professeurs; (4) et les artistes puisant dans des répertoires culturels disparates obtiennent en moyenne de meilleurs critiques.

J’essaie de faire de la diversité un principe cardinal dans l’organisation de mon programme de recherche sur les institutions internationales. Mon travail navigue entre différents enjeux internationaux, dont le commerce, l’environnement, la propriété intellectuelle et l’espace. Je mobilise une vaste gamme de méthodes, allant de l’analyse de discours aux statistiques. J’ai collaboré avec plus d’une soixantaine de chercheurs, établis dans différents pays et de différentes disciplines. Cultiver la diversité n’a pas toujours été facile, mais c’est ce qui me motive et me stimule.

Pour être franc, ma recherche constante de diversité m’a d’abord fait hésiter lorsque l’Université Laval m’a proposé une chaire de recherche du Canada en 2014. La ville de Québec n’est pas connue pour sa diversité culturelle. C’est dans cette ville que j’ai moi-même grandi et j’aspirais à élever mes filles dans un environnement plus cosmopolite. Cependant, j’ai vite réalisé que la ville de Québec avait bien changé depuis mon départ. À l’école des enfants, j’entends plusieurs langues différentes et toute une gamme d’accents. À l’Université, j’ai la chance de pouvoir travailler au sein de deux instituts interdisciplinaires, un premier en études internationales et l’autre sur l’environnement, qui m’ont offert la possibilité de collaborer avec des chercheurs de différentes disciplines.

C’est aussi à l’Université Laval que j’ai commencé à m’intéresser à la diversité comme objet d’études. Dans le cadre d’un premier projet de recherche, j’ai établi que les accords commerciaux liant des pays hétérogènes ont une plus grande probabilité d’inclure des clauses novatrices que ceux unissant des pays similaires. Mon projet de recherche actuel vise à vérifier si les agences spatiales parviennent mieux à coopérer pour résoudre le problème des débris spatiaux si elles ont des expertises différentes.

L’idée que la diversité soit une force soulève des enjeux majeurs pour la politique étrangère canadienne. Elle implique que négocier des traités avec les alliés traditionnels du Canada n’est pas nécessairement la stratégie la plus productive. Elle suppose également que la voie multilatérale n’est pas toujours optimale. Parfois, une gouvernance fragmentée, faite d’une série d’institutions bilatérales, est plus appropriée pour mettre en relations des points des vues différents, tester de nouvelles solutions, apprendre de ses expériences, et favoriser une adaptation continue. Le Canada est bien positionné pour servir de pont dans un système international fragmenté. Cependant, aller au-delà des slogans politiques et faire de la diversité une véritable stratégie est un défi de taille. J’en sais quelque chose.

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Auteur

Jean-Frédéric Morin
Jean-Frédéric Morin is a CIC Fellow and Canada Research Chair at Laval University. As a CIC researcher, he will target two specific ideas, namely the liberalization of environmental technologies and environmental customs duties, on which he intends to engage with Canadians through traditional and digital media.